lundi 27 juillet 2020

Un monde magnifique et serein






Rien que des merveilles ce matin ! Mon regard est d’abord tombé sur ce massif de delphiniums, impressionnants avec leurs hampes bleu intense, et, à leurs pieds, déjà les premières tiges frêles de capucines qui se déroulent, intrépides, ; au fond, le vieux rosier, accroché aux pierres du mur, a retrouvé l’enthousiasme de la jeunesse et croule sous les fleurs et les boutons, pendant que, toutes pimpantes, les marguerites se balancent au gré de leur petite musique.

 
J’étais sortie bien décidée à en finir avec tout ce qui est en retard : la cabane à bois, c’est simple, on ne peut plus y rentrer, je vais y remettre de l’ordre, ah mais ; il y a les les outils de jardin qui ont besoin d’être bichonnés, le petit bois à ranger dans des cageots et ce tas de cartons à plier et mettre dans la voiture, et ...et... mais le monde m’a stoppé dans mon élan et m’a rappelé le plus important, que j’oublie trop souvent : regarder, admirer, remercier.

 
Juste en face de la porte de la cuisine, le jardin m’a attrapée en premier ; il a été l’objet de nos soins : plantations, désherbage, toute une attention bienveillante ; nous avons encouragé ses hôtes avec des gratouillis à leurs pieds et des paroles roucoulées. Nous l’admirons d’un regard de propriétaire, c’est notre travail, notre œuvre, notre récompense.

 
Mais si je tourne un peu la tête, je vois la prairie, et là ! C’est une énergie incroyable, toute en vrac, en fouillis, herbes et fleurs mêlées, à qui poussera le plus haut, à qui aura plus de fleurs, à qui attrapera le premier rayon de soleil. Il y a du bleu, du jaune, du rose, et du vert, du vert qui fait du bien aux yeux et au coeur, du vert si tendre qu’on voudrait le manger, ou si éclatant qu’on voudrait le mettre dans sa poche pour le garder toujours.

 
Chaque printemps elle nous surprend avec des petits bouts de tiges qui se haussent du col sur une terre encore gelée, de minuscules fleurettes qui s’ouvrent sans craindre la prochaine chute de neige, puis en début d’été, elle éclate de promesses et s’abandonne, cette prairie, à la pure joie d’être, à la vie.

 
A la contempler, je sens quelque chose qui se dénoue en moi : nous avons passé tant de semaines à regarder le monde comme dangereux, presque hostile : oui c’est vrai, il peut l’être, mais j’avais oublié qu’il était aussi – d’abord ? - beauté, don, offrande. 

 

Abritée entre des murs, j’avais ignoré la force de la terre et son travail aussi vieux que le monde : faire renaître la vie ; enfermée, j’avais désappris le don du ciel sans limites qui chaque matin réveille l’espoir. J’avais perdu ce qui est la trame de toute existence : l’offrande continue, indispensable, invisible.

 
Immobile au milieu de la cour, respirant dans la grande respiration du monde, me reviennent à l’esprit comme une prière les mots d’un ces vieux moines japonais : « Le ciel et la terre font des offrandes. L’air, l’eau, les plantes, les animaux et les êtres humains font des offrandes. Toutes les choses se font des offrandes mutuelles. Ce n’est que dans ce cercle d’offrandes que nous pouvons vivre. »

 
Ce cercle d’offrandes, je le vois maintenant partout autour de moi, dans l’herbe et ses insectes, dans le petit nuage blanc qui flotte, dans les abeilles, dans notre travail aussi et celui de tous ceux et celles qui nous ont précédés ici.

 
Et ce moine, Kodo Sawaki, poursuit : «  Le monde dans lequel nous donnons et recevons est un monde magnifique et serein. »

 
Matin d’offrandes, matin de merveilles, un matin comme tous les matins. 




La Vie les Essentiels  
Photos: Anne, Marcelo, Lulena

lundi 20 juillet 2020

Faisons une pause...Fredonnons...


Faisons une pause. Tenez, asseyez-vous une minute...


Vous êtes déjà assis? Mais non, voyons, vous êtes juste posé sur votre chaise: asseyez -vous vraiment  - les pieds bien ancrés au sol, les épaules souples, tranquille et détendu...

S'il n'y a pas de pins, ni de terrasses, pas de source qui chante ni de pleine lune dans le ciel, ce n'est pas grave:

respirez! 

Et lisez doucement, en le fredonnant peut-être, les textes de Yikui.
 

Laissez votre esprit vagabonder un peu...

Alors vous sentirez le parfum des feuilles, l'odeur de la terre. 

Vous entendrez le clapotis du ruisseau, les chants des cigales, le vent qui caresse les grands pins.

Ca y est? Alors relisez Yikui, chantonnez-le, pénétrez-le, accompagnez-le...

Tout va bien.


Dans la forêt 
les nuages de beau temps
au creux des ravins,
là où les pruniers dispersés,
se tiennent droits et fiers.
Fredonnant, je me prépare à aller
chercher l'eau à la source ;
les herbes ramassées m'enveloppent de leur parfum à mon retour.
Sur les feuilles, 
les gathas de Hanshan,
dans les nuages 
les terrasses de la sagesse.
Je suis mon bâton de mûrier là où
il m'emmène,
vers un banc couvert de mousse gris-vert.

Méditation Chan

Lorsque toutes les portes ont volé en éclats, chaque endroit est
un endroit tranquille.
Lorsque l'esprit n'est plus attaché aux choses, toutes les choses
deviennent pures.
Alors, je m'assois tranquillement à l'ombre des pins
et regarde le crapaud dans la lune
s'élever doucement et flotter,
là-bas vers l'est.

Yikui

















lundi 13 juillet 2020

Marcher sans cesse



marcher sans cesse avec la grande montagne bleue -
arpenter les nuages avec l'eau des rivières -

changer constamment:

le changement est notre constante
depuis l'époque d'avant
depuis avant le kalpa du Vide

- à ce moment, 
  à cet instant,
nous sommes immobiles -
absolument, complètement immobiles.

dans cette lumière

rien ne bouge


 

dimanche 5 juillet 2020

Promenades au pays du Haiku et des grenouilles







 une haie d'hibiscus
une petite échoppe
de sandales en paille

Shiki



elle franchit le seuil de ma porte
sans s'en rendre compte
la grenouille 

Ryoto



un soutra bouddhiste? 
dans le puits du temple
les grenouilles croassent



Kanetsu

 nuit sans lune
dans le jardin 
juste le bruit des insectes

Ryokan

quelqu'un traverse le pont
les grenouilles
se taisent

Ryoto




Au Japon, la grenouille est considérée comme un symbole spirituel. Son nom signifie" retour", elle porte bonheur.
 Elle est très présente dans les haïkus. Son coassement continu dans les rizières l'été servait à s'assurer que personne ne pouvait toucher aux plants de riz!  Aujourd'hui encore elle évoque pour tous les japonais le chant des nuits d'été...


  
Haïkus in :  365 Haïkus ed. Albin Michel
ill. discstorytelling, altjapan.typepad, en.wikipedia,etsy

mercredi 1 juillet 2020

Plantes et pierres deviennent bouddhas...




                                        Plantes et pierres deviennent bouddhas...








La fin d'un blog

     Impermanence et changement...    pas facile parfois... la fin de ce blog depuis avril 2012, pour moi, un espace de liberté, un espace d...